04/11 Nous avons rendez-vous avec Gaël des Iles de Paix à Huánuco dans une semaine et devons donc parcourir 1000 kilomètres à travers les Andes sans plus attendre si nous ne voulons pas le rater. Nous quittons donc définitivement Cusco pour atteindre notre premier objectif : le mirador aux condors à Chonta.
Nous reprenons pour la troisième fois la route vers Abancay, repassons le canyon de l’Apurimac, source de l’Amazone, et bifurquons vers Chonta peu avant le pont Kunyac, pont mythique qui autrefois était un très long pont suspendu, terreur de tous les arrieros devant l’emprunter.
La route pour monter vers Concha est magnifique et, une fois de plus, nous avalons des mètres de dénivelés pour découvrir un des plus charmants villages traversés pendant notre périple. Pour une fois, toutes les maisons sont authentiques et encore construites en adobes et recouvertes de tuiles romaines. Il y fait propre également.
À l’autre extrémité du village se trouve le poste de contrôle du début de la promenade. Une mamita (pas très authentique, elle !) nous arrosant à chaque fin de phrase de « si, Mamitaaa », « no, Papitaaa » et qui m’exaspèrent un peu, nous soutire notre droit d’entrée au site tout en nous permettant de rester sur place pour la nuit. L’endroit est idyllique, merci !
Et quelle chance, car le lendemain, nous ne verrons qu’un seul condor à plus d’un kilomètre de distance alors que la fameuse mamita m’avait certifié qu’il y en avait plein ! Sur le retour, je croise un garde-condors et je m’emporte en espagnol à la plus grande surprise de Dominique qui se marre de m’entendre les traiter tous de voleurs au Pérou ; il essaie de me calmer en me convaincant que le pauvre garde n’y est pour rien … Oui, mais, quand même ! Et puis, cet imbécile nous dit de revenir vers 13h30 car c’est l’heure à laquelle ils se montrent et, là, j’imagine un morceau de viande qui dépasse de son sac à dos … Ho, quelle arnaque ! Je m’emporte à nouveau pour le plus grand plaisir de mon compagnon de marche … Il me faudra la journée entière pour me calmer !
Alors, oui, le bivouac était vraiment splendide mais, franchement, il me laisse un goût amer …
Bon, nous reprenons la route vers Abancay … Sur la carte, ce n’est vraiment pas loin mais, en réalité, c’est vraiment très long.
Et ce n’est pas à cause de l’état de la route cette fois-ci mais bien parce que l’on monte à 4000 mètres de nouveau pour redescendre en d’interminables lacets vers Abancay que l’on aperçoit presque deux heures avant de la traverser ! Nous bivouaquons juste après Abancay près d’un joli vieux pont colonial à 1700 mètres d’altitude.
Aujourd’hui, l’objectif est d’atteindre Ayacucho … Quand nous démarrons, la police touristique nous met en garde contre les dangers de la route au Pérou … Merci mais nous connaissons. Elle nous dit que les Péruviens ne savent pas conduire (vrai), qu’il y a plein de trafiquants partout (faux), que les gens sont méfiants et agressifs (vrai pour la zone que nous traversons) …
Surtout soyez prudents !
Ben tiens, c’est totalement dans nos habitudes d’être imprudents, vous savez !
Elle nous prend en photo, je la prends en photo. Elle justifie ainsi qu’elle travaille (pour une fois !), j’ai une preuve qu’elle travaille et, surtout, qu’elle ne va plus m’em…… !
Hé oui, au Pérou, les policiers sont un chouya trop collants … si vous voyez ce que je veux dire !
En milieu de journée, nous sommes remontés à 3650 mètres d’altitude, où nous avons admiré la pyramide carrée de Curamba tout en dînant.
Pendant cette traversée du Pérou, nous prenons le temps de cuisiner à midi afin de faire un vrai break pour dégourdir les jambes du chauffeur et de ses passagers !
Et puis, nous culminons une bonne partie de l’après-midi sur des crêtes avant de descendre vers San Jerómino où nous nous parquons sur la plaza de Armas pour la nuit.
07/11 Nous avons essuyé un fameux orage cette nuit !
Pendant le petit déjeuner, nous admirons des mamitas en pleine séance de vote ; elles font la file devant un banc public où sont assises deux personnes qui enregistrent leur choix. C’est assez comique à regarder.
Bon, il est l’heure de redémarrer … Nous suivons une vallée tout un moment, nous mangeons le long de la route sous un soleil de plomb et remontons vers les 4000 mètres. Dans les vallées, les paysages sont verts et cultivés ; sur les hauts plateaux, c’est plus sec et aride. Chaque jour, nous flirtons avec les nuages avant de replonger dans des vallées et, généralement, croiser une rivière à moins de 2000 mètres d’altitude pour grimper à nouveau. De tout repos, cette route, je vous dis. En plus, les paysages traversés ne sont pas vraiment exceptionnels par rapport à ce que nous avons déjà eu l’occasion d’admirer au cours de notre périple. Hé oui, nous sommes un peu blasés.
Nous espérons que les Îles de Paix valent la peine car se taper toute cette route ne nous enchante pas vraiment ! Bon, en attendant, nous profitons de capturer des scènes de vie typiques de ce continent comme les interminables files d’attente devant les banques, les taxis à trois roues que nous avons surnommé « scarabées » customisés à souhait ou encore les constructions éternellement « en construction » pour éviter de payer ses impôts …
Nous redescendons donc pour la nuit et bivouaquons sous les arbres. Les enfants sont super contents ; ils sont excités à l’idée de pouvoir jouer un peu dehors dans des bois … Au bout de 10 minutes, un nouvel orage s’abat sur nous ! ZUT !
08/11 Les enfants jouent dehors pendant que nous nettoyons Titi.
Aujourd’hui, nous devons passer Ayacucho … Nous n’ouvrons pas le guide touristique mais le GPS … Argh, toutes les grandes routes convergent vers le centre et puis, plus rien … Je décide d’éviter le centre en prenant ce que je pense être un contournement de la ville … Ha quelle bonne idée, nous nous retrouvons dans une piste, pire qu’une piste avec des pentes dignes d’un parcours de motocross ! Super, je me fais petite dans mon siège et encourage comme je peux mon voisin qui peste une fois de plus sur les voiries sud-américaines !
Bon, nous voilà sortis de ce merdier, mais une nouvelle particularité péruvienne va nous énerver pendant les 20 prochains kilomètres : les gendarmes couchés … Mais oui, souvenez-vous : les casses-vitesse ! Sur 20 kilomètres, nous en avons dû en surmonter 10 par kilomètre … Soit, ralentir, descendre de 5 vitesses (pour rappel, pour débrayer, il faut exercer une force équivalente à l’ouverture d’une porte coupe-feu bien lourde), passer l’obstacle sans trop secouer toute la caisse et remonter de 5 vitesses (pour rappel, pour débrayer, il faut exercer une force équivalente à l’ouverture d’une porte coupe-feu bien lourde). Dominique devient fou !
Bon, pour divertir le conducteur et l’équipe, je propose de faire un petit détour par Quinua. Cette petite bourgade présente la particularité assez originale d’avoir les faîtes des toits recouverts de petits objets en céramique. La plupart représente la même petite chapelle mais on peut aussi découvrir des objets très divers comme des bœufs ou des vases mais aussi des personnages.
C’est très joli et nous déambulons avec beaucoup de plaisir dans les quelques rues de l’entité. Les petits ne s’y intéressent pas trop par contre !
Nous reprenons la PE-3S vers Huanta que nous traversons en faisant le pari de savoir combien il y aura de gendarmes couchés … C’est Pauline qui gagne avec 13 GC ! Pendant notre comptage, nous ne regardons pas trop les indications et nous nous retrouvons à nouveau dans une piste digne d’un chantier de construction de route ou, je dirais même mieux, d’une carrière. Hé oui, la route nationale change parfois un peu de qualité !
Bon après ce très mauvais tronçon, nous débouchons sur une route ressemblant à un circuit automobile parfois interrompue par de la piste car les nouveaux ponts sont encore en construction.
Et puis, nous nous engouffrons dans un interminable canyon alors que la nuit tombe déjà.
Nous ne parvenons pas à trouver d’endroits pour passer la nuit. La route est étroite et les conducteurs, dangereux. Finalement, après des heures de route, nous nous arrêtons à La Esmeralda devant le poste de police.
09/11 Nous avançons bien. Nous sommes enfin sortis de notre canyon, avons croisé un joli pont colonial laissé à l’abandon et très peu mis en valeur à Izcuchaca.
Puis, nous traversons Huancayo qui paraît être une ville fortement animée et arrivons à nouveau tard dans la soirée à un super bivouac au milieu de champs de patates.
Le lendemain, nous décidons d’atteindre le village de Paca pour midi, car, d’après l’application i-overlander, il y a une jolie place avec une plaine de jeux. Grand malheur que cette bonne idée.
Nous arrêtons sur la petite place en question, Pauline et Louis fuient vers la plaine de jeux, découvre le lieu et reviennent assez vite alors que je lance le dîner … pas par la fenêtre, bien sûr ! Je voulais dire que je mets le dîner en route (non pas sur la route !)
Maman, nous ne pouvons pas jouer !
Comment cela ? Il y a plein de place … Vous n’êtes jamais contents !
Non, Maman, il y a une dame qui voudrait te parler ; nous ne pouvons pas aller à la plaine de jeux !
Et pourquoi ?
Nous sommes trop grands, c’est pour les enfants de moins de cinq ans !
Elle est où votre dame ?
De l’autre côté du camion, elle lave son linge au lavoir.
J’ouvre la fenêtre côté lavoir et, avant même de pouvoir ouvrir la bouche, la fameuse dame (pour ne pas dire l’énorme dame) me crie dessus (je reste polie) en m’expliquant que mes enfants ne peuvent pas aller sur les jeux !
Oh, je me sens agressée en tant que mère de famille.
Mes enfants ne font rien de mal en grimpant à une échelle de corde absolument impossible d’accès à un enfant de moins de 5 ans … je ne comprends pas mais réalise que ce qui ennuie le plus la chère (en bonne chair) petite dame est la couleur claire des cheveux et des yeux de mes blondinets … C’est la première fois que nous ressentons autant d’agression dans la voix d’un autochtone, nous faisons face à une sorte de racisme que nous ne rencontrons que très rarement en tant que « blancs » ! Mais, moi, en tant que mère, je n’admets pas qu’on interdise à mes enfants l’accès d’une plaine de jeux située dans un endroit public où il n’y a absolument aucune restriction écrite qui l’indique ! Je m’énerve donc un petit coup et utilise tout mon vocabulaire hispanique pour lui dire que je m’en fous de ses injonctions et que mes enfants peuvent continuer à jouer. Sur ce, la petite (monstrueuse) dame passe de rouge à écarlate et s’emporte également et crie encore plus fort … jusqu’à ce que les petits descendent de la fameuse échelle et reviennent vers moi en disant de laisser tomber car elle n’en vaut pas la peine … Hé oui, les 3 Maquets essaie de calmer la Buyse à grande peine, je l’admets !
Nous mangeons devant le lavoir, rions de la dame qui n’ose pas nous regarder en face et reconnaissons définitivement son racisme lorsque d’autres enfants à peine plus jeunes que les nôtres arrivent et se jettent sur ladite échelle sans recevoir de savon de la mamita ! Nous quittons les lieux dès que le dîner est fini avec ce goût amer en bouche d’être malvenus dans une région !
Nous savions que les Péruviens pouvaient être agressifs envers les étrangers mais nous n’avions pas encore connu nous-mêmes la chose … Hé bien, c’est désagréable. Ce fut bien sûr l’occasion de parler du racisme avec les enfants et de leur expliquer que tout le monde y est de temps à autre. Dans ces situations, il y a toujours une personne agressée mais aussi un agresseur. Nous, en tant qu’Européen, nous nous trouvions aujourd’hui agressés mais nous devons reconnaître que nos ancêtres étaient plutôt des agresseurs dans les régions que nous traversons actuellement.
Nous reprenons la route et décidons de nous diriger vers Tarma car la route n’est pas plus longue et que la plus grande grotte d’Amérique du Sud est située dans ce coin ! Nous avons pas mal roulé ces derniers temps, nous avançons très bien et nous pouvons donc nous permettre de faire un peu de tourisme.
Nous traversons ce que nous pensons être le grenier du Pérou …
Il y a des cultures en terrasses partout autour de nous et de nombreux agriculteurs travaillent dans les champs. Ils travaillent comme au Moyen-Âge : en groupe, à la main et courbés en permanence en deux.
Les camions de transport vont et viennent et ramassent là quelques sacs de pommes de terre, ici, des choux et plus loin, des carottes. Les parcelles sont petites, mais le travail est permanent. Dans cette région, cela turbine comme dans une ruche ! Et c’est en plus très joli à regarder car, outre la culture de fruits et légumes, il y a aussi des champs de fleurs !
Nous arrivons à la tombée de la nuit à la Gruta de Huagapo et parquons devant une jolie cascade.
Rendez-vous est pris avec un guide pour une visite matinale le lendemain matin.
Bon, nous ne pensons pas que ce soit la plus grande grotte d’Amérique du Sud mais la visite valait bien le détour. Pour les petits, surtout, car nous faisons un peu de rappel, de grimpette à la corde et nous nous enfonçons jusqu’à plus de 300 mètres pour découvrir une vierge perchée sur un rocher.
Apparemment, des plongeurs ont déjà exploré plus d’un kilomètre de boyau et le plus long mesurerait une dizaine de kilomètres ! Belle visite en compagnie d’un sympathique guide.
Et une fois de plus, nous reprenons la route pour remonter sur un plateau situé à 4000 mètres d’altitude. Cette fois-ci, on y trouve une énorme lagune, des vigognes, des mines et une des lignes de chemin de fer les plus hautes au monde.
Nous dînons au bord de la lagune et admirons les flamants roses.
Il fait assez froid et nous voulons redescendre du plateau pour dormir.
Au loin, un orage s’annonce et la cordillère de Huayhuash apparaît joliment en ombre chinoise.
Nous traversons Cerro de Pasco pour trouver du pain et fuyons cette ville minière car elle est morne et glauque ; il y fait aussi caillant et les gens longent les murs comme pour échapper à leur misère.
Nous descendons donc le long du Rio Huallaga pour nous diriger (enfin !) vers Huánuco. Une pluie soutenue nous accompagne et la nuit tombe, nous peinons à trouver un bivouac. Le premier est devenu inaccessible car la terre est gorgée d’eau et nous ne voulons pas patauger ; le second est trouvé à l’arraché mais la police nous déloge car, selon elle, nous ne sommes pas en sécurité à cet endroit ; enfin, le troisième repéré sur la carte devient difficilement accessible car une coulée de boue barre la chaussée … Une file interminable de voitures et camions s’est formée et nous nous permettons de la dépasser pour rejoindre la place du village de San Rafael mais les gens montrent une forte animosité en nous voyant dépasser toute la file ; je dois régulièrement descendre du camion et expliquer notre but. Certains comprennent directement, d’autres conservent un regard assez hostile ; nous faisons profil bas. Enfin, nous mettons Titi de niveau et éteignons le moteur. Ouf, nous voilà logés pour la nuit.
Nous sommes à côté de la maison communale gardée jour et nuit. Avant de me coucher, je parcours la grande route et dois marcher un certain moment avant de découvrir la fameuse coulée de boue qui bloque les dizaines de véhicules que nous avons dépassés. Quelle inondation, les malheureux voyageurs ne sont pas prêts de bouger ! Moi, je vais dormir … Nous verrons bien demain si nous pourrons continuer !
12/11 Nous passons sans problème à l’endroit de la coulée de boue et nous nous laissons rouler jusqu’à Huánuco … Hé oui, nous y sommes à temps et à heure. Demain, nous avons rendez-vous avec Gaël. Nous espérons que cette traversée des Andes n’est pas vaine car elle ne nous a pas franchement passionnés … Le Pérou n’est pas, à nos yeux, le pays le plus accueillant que nous ayons traversé ; il est très sale et ses habitants, assez agressifs et méfiants. De ce fait, notre comportement a aussi changé et nous sommes également devenus un peu méfiants et souvent agressifs, voire hargneux !
By the way, nous vous informons également qu’aujourd’hui, le 7 janvier 2018, nous sommes rentrés en Belgique depuis plus d’une semaine. Nous avons retrouvé avec beaucoup de joie et d’émotions nos familles et nos amis. Nous subissons la pluie froide et continue bien typique de notre Belgique et son manque de clarté, et nous espérons de tout cœur voir une éclaircie prochaine … Por favor, un poco de sol !
En attendant, vous pouvez continuer à nous suivre car nous allons vous proposer encore quelques articles afin de conter la fin de notre aventure sud-américaine. Restez connectés !